Calcul

  • Le 04/06/2022

Un petit exercice…
La fréquence d’une maladie est de 1% ; un test de dépistage de la maladie donne un taux de vrais positifs de 90% et un taux de faux positifs de 8%.
Quelle est la probabilité qu’un patient qui a un résultat positif au test soit vraiment atteint de la maladie ?

Un théorème attribué au révérend Bayes (1702-1761) permet de calculer la probabilité d’une hypothèse : le patient est atteint de la maladie, étant donné une preuve : son test est positif.
Pour notre exercice, le calcul de Bayes indique que la probabilité que le patient soit vraiment atteint de la maladie est de 10%.

Ce résultat est contre-intuitif.
L’intuition nous conduit en effet à privilégier le taux élevé de 90% (la bonne qualité du test) et négliger le taux faible de 1% (la rareté de la maladie) pour imaginer une probabilité entre 80 et 90%.

A partir de différents exemples, le psychologue Daniel Kahneman montre que nous sommes tous de mauvais bayésiens spontanés, au sens où nous appréhendons mal cette probabilité bayésienne qui mesure la confiance que nous pouvons accorder à une hypothèse.

Cela dépend en fait des circonstances.
Quiconque entend dans une campagne française, sans voir d’où il vient, un bruit de sabot, pensera spontanément que le bruit provient plutôt d’un sabot de cheval que d’un sabot de zèbre.
Un exemple où le raisonnement bayésien est spontanément bien conduit car il tient compte de la rareté des zèbres dans la campagne française.

Le raisonnement bayésien reste bien inopérant dans de nombreux cas, en particulier lorsqu’il s’agit de phénomènes paranormaux.
Des enquêtes répétées sur la période 2000-2010 ont montré que les trois quarts des Américains ont au moins une croyance paranormale : possession par le diable, perception extrasensorielle, fantômes et esprits, astrologie, sorcières, communication avec les morts, réincarnation, énergie spirituelle des montagnes ou des arbres, mauvais œil, voyance.
La rareté des phénomènes qualifiés de paranormaux et la mauvaise qualité des témoignages qui les rapportent sont simplement ignorées par les croyants.

Les chiffres homologues de notre exercice (fréquence, vrais positifs, faux positifs) qu’on peut associer à ces phénomènes paranormaux conduisent pourtant par le calcul à une probabilité infinitésimale que ces phénomènes soient vrais.

Pour beaucoup d’entre nous, si rien ne s’oppose de façon certaine à une hypothèse, on considère qu’on peut la retenir, la probabilité qu’elle soit vraie fût-elle infinitésimale.
On ignore alors tout ce qui contribue à soutenir le contraire de l’hypothèse.
Montaigne faisait ainsi observer que dans les églises où sont exposés les ex-voto des marins sauvés d’un naufrage par leurs prières, devraient figurer les noms de ceux qui ne sont pas revenus, malgré leurs prières.

Nous devons prendre garde à ces croyances invraisemblables ou fausses que nous sommes tentés d’accepter au mépris de la raison ou du calcul.
Recommandation d’un hypocondriaque qui a survécu à de nombreuses maladies aussi graves que rares, par la grâce de Dieu.